Vrauk était installé dans la cabine qui lui servait de salle de pilotage. Ses huit antennes dont chaque bout contenait ses organes visuels n’étaient plus de couleur vertes vif mais tournaient à présent vers le marron, signe d’une grande fatigue physique chez la race des Pléiadiens. Depuis l’incident arrivé il y a neuf jours, le souci de faire survivre ce qu’il restait de son ancienne base occupait totalement son esprit. Alors qu’il était en train de rédiger les évènements du jour sur son ordinateur grâce à ses sept doigts situés sur chaque mains, il entendit la porte de sa cabine située derrière lui s’ouvrir. Cela avait le don de l’exaspérer lorsqu’un membre de son équipe ne le prévenait pas à l’avance d’une entrevue, surtout lorsqu’il était en train de rédiger ses rapports. Il se retient de montrer sa lassitude et demanda à son visiteur la raison de sa venue :

- Tiens donc mon cher Taagzut, que me vaut cette visite imprévue ?

- Commandant Vrauk, désolé de vous déranger à nouveau. Mais l’équipage me pose des questions quant à ce que nous allons devenir. En tant que votre second, je me dois de leur apporter des réponses suite à l’incident d’il y a neuf jours.

- Je sais mon bon Taagzut. Ne vous inquiétez pas, je suis en train de finaliser la rédaction de nos prochains objectifs. Je suis sûr que l’équipage a bien conscience du caractère exceptionnel de ce qui nous est arrivé et qu’il est normal de prendre du temps pour rétablir la situation.

- Depuis l’attaque surprise des reptiliens de Draconis, l’équipage fait au mieux pour survivre. Mais comme vous le savez, il est composé exclusivement de scientifiques. Ces gens ont un esprit rationnel qui repose sur logique et non sur la croyance. Il faut leur donner de l’espoir mais avec des éléments concrets.

- Et ils en auront, je vous l’assure mon cher Taagzut. Cependant, je constate qu’aucun de nos esprits rationnels n’ont pu prédire l’attaque des reptiliens. Si la base n’avait pas été construite près du rivage du pôle nord, jamais nous n’aurions pu construire à ce temps cette base de fortune au sein d’un iceberg. Cela nous a permis d’échapper à la destruction totale.

- Oui Commandant Vrauk, votre réactivité nous a tous sauvé, nous le savons tous. Sauf que nous sommes au sein d’un iceberg dont nous contrôlons difficilement le cap et la vitesse. Suite à l’attaque, nous n’avons pas pu embarquer assez de matériaux pour construire ce qu’il nous faut.

- Tout ce que je peux vous dire pour le moment, c’est que nous nous situons au milieu du second plus grand océan de cette planète. Je suis en train de créer un programme qui nous permettra d’utiliser l’attraction de la Lune afin d’aider nos moteur de fortune à propulsion gravitationnels de récupérer un peu d’énergie. Une fois les batteries rechargées, nous pourrons soulager l’équipage.

- Puis-je annoncer cette nouvelle à l’équipage Commandant Vrauk. Cela les aiderai à garder le moral.

- Si vous estimez qu’il y a un risque de démobilisation général, je vous autorise à leur en faire part. Cependant, je ne veux pas que l’équipage situé en bas de l’iceberg ne cesse de ramer. C’est la seule énergie dont nous disposons pour nous déplacer où nous le souhaitons pour le moment. Il faut que tout le monde reste mobilisé.

- Je leur ferai part de cette information Commandant. Cependant, une solution durable à notre triste situation devra bientôt être communiquée car la patience de l’équipage n’est pas infini. Permettez moi à présent de prendre congé.

 

    Vrauk fit un signe de tête à son second en signe d’approbation et reprit la rédaction de son rapport qui était presque finalisé. Il se mit à repenser à cette triste journée où la base fut attaquée par les reptiliens. Aucun rapport des espions de l’empire Pléiadien n’avait fait part d’une quelconque menace, ni même d’une présence reptilienne sur cette planète. Il se dit que la nature pacifiste de son peuple l’empêchait d’envisager que d’autres civilisations avancées puissent être malfaisantes. Il était persuadé que le manque de ressources énergétique était la source de tout conflit. Mais depuis cette attaque, il savait qu’il existait des peuples qui n’avaient qu’une seule idée en tête : l’hégémonie de leur espèce sur toute autre espèce étrangère. Il a fallu qu’il se retrouve au sein d’une base de fortune installée dans un iceberg pour comprendre cela.

 

    Il se remit à se plonger dans ses cartes maritimes. Il estimait que sa base de fortune se situait actuellement suffisamment loin du rivage où a eu lieu l’attaque pour être tranquille pendant un jour ou deux. De plus, de nombreux icebergs étaient présents dans un rayon de 200 kilomètres de la base, rendant difficile la reconnaissance de sa position par une éventuelle sonde reptilienne. Au cours de ses recherches, il comprit rapidement que la planète sur laquelle il se trouvait était habitée par des êtres évolués, contrairement à ce qu’on lui avait annoncé avant qu’il ne se lance dans ce projet de colonisation. Les mouvements que ses radars avaient repérés ne laissaient planer aucun doute. Des véhicules étaient présents sur cet océan. Vrauk prit alors conscience d’une nouvelle difficulté. Il lui fallait non seulement éviter les reptiliens mais également les autochtones car si jamais ils découvraient que leur planète était visitée, un vent de panique surgira rapidement au travers de leurs communications et sera captée facilement par les reptiliens qui n’auront alors aucun mal à localiser sa base cachée dans cet iceberg. Il ordonna alors aux rameurs situés dans les profondeurs de l’iceberg se reposer, ainsi l’iceberg ne bougera que de façon naturelle et pourra facilement être évité si jamais l’un de ces véhicules autochtones venait à croiser sa route.

 

    Après toutes ces émotions, il se dit que c’était à présent à son tour de se reposer. Il se cala dans le hamac de fortune qu’il s’était installé dans sa cabine et commença à somnoler sans difficulté malgré tout le stress emmagasiné ces dernières heures. Ses huit yeux se fermèrent l’un après l’autre et un rêve commença à prendre forme dans son esprit. Il se revit plus jeune, alors qu’il n’avait encore que quatre yeux, angoisser pour sa première mission de colonisation alors qu’il devait poser le vaisseau contenant tout l’équipage qui était chargé d’une mission de reconnaissance sur Lostar IV. Il revit le moment où son vaisseau commença à pénétrer dans l’atmosphère qui était plus dense que prévu. Tous les boutons d’urgence s’étaient alors allumés, le plongeant dans une panique totale. Puis ce bruit d’alarme strident qui avait marqué son âme à tout jamais se fit entendre. Mais dans ce rêve, il vit Taagzut, alors qu’il n’était pas présent dans la mission vers Lostar IV. Il le vit en train de crier des choses qui n’avait pas de sens dans ce rêve : « Les autochtones ! Les autochtones nous ont percuté ».

 

    Vrauk se réveilla alors d’un coup, les huit yeux en alerte et les oreilles percées par l’alarme stridente qui était présente dans son rêve. A sa droite, Taagzut dont le visage témoignait d’une panique totale lui cria : « Enfin vous êtes réveillé ! Les autochtones ont percuté la base ! Nous risquons d’être découverts ». Vrauk quitta immédiatement son hamac pour demander à Taagzut de se rendre au périscope et de lui faire un premier compte-rendu. Taagzut s’exécuta. Après avoir passé quinze minutes à examiner la situation, il retourna voir Vrauk pour lui faire un premier rapport : « Un navire autochtone nous a effectivement percuté. L’aile droite de leur véhicule a été touché. D’après mes analyses, cela n’a pas l’air très grave, leur navire me semble à priori suffisamment solide pour éviter de couler. Le diagnostic de l’incident étant mineur, cela ne devrait pas éveiller les soupçons des reptiliens lorsqu’ils auront connaissance de cet incident.

- Voilà qui est rassurant mon cher Taagzut. A ce propos, avez-vous pu identifier le nom de ce navire ?

- Titanic, Commandant Vrauk. Le nom de ce navire est le Titanic.

 

FIN

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