Bien assises confortablement sur les sièges arrières de la limousine qui leur a été prêtée pour l’évènement, Stéphania et sa fille de 8 ans Louise contemplèrent en silence à travers les fenêtres blindées le paysage désertique qui longeait la route 318. Cela faisait maintenant 6 heures que leur voyage avait débuté. Stéphania se remémora le moment où elle apprit qu’elle avait été tirée au sort lors du grand concours de Gemini Croquette et la joie qui éclairé le visage de sa fille lorsqu’elle avait appris la nouvelle. Un mois plus tard, les voici dans cette limousine qui était l’un des derniers véhicule à posséder un moteur à essence depuis l’explosion du cours du baril de pétrole de 2128, année durant laquelle le prix du gallon d’essence avait dépassé les 300 $ suite à la fin de réserves des puits de pétrole du Moyen-Orient. Ce concours leur permit ainsi de pouvoir vivre, du moins jusqu’à leur arrivée, comme des milliardaires. Train de vie qui était celui de la classe moyenne il y a peine 100 ans.

 

    Louise commençait à s’agiter, n’ayant rien pour l’occuper si ce n’est le paysage qui défilait et demanda à sa maman s’il y en avait encore pour longtemps. Stéphania n’ayant pas été informée de la durée du voyage se contenta de lui dire qu’elles seront bientôt arrivées tout faisant son maximum pour lui cacher son inquiétude face à la durée du voyage qui s’éternisait. La limousine étant pilotée par un robot de la compagnie, toutes les questions que lui avaient posées Stéphania étaient restées sans réponse.

 

    Une heure plus tard, la limousine prit enfin une sortie d’autoroute. Les panneaux de signalisation n’ayant plus été entretenus depuis des années, il était parfois difficile de les déchiffrer. Mais Stéphania eut le temps de voir qu’ils avaient pris la route de Crystal Springs. Cette ville ressemblait à beaucoup de villes américaines : des magasins vides qui affichaient tous un panneaux « à vendre » sur leur porte d’entrée, de la végétation qui reprenait ses droits le long des trottoirs et des feux de signalisations qui ne fonctionnaient plus depuis des années. Louise commença à interroger sa maman sur ce qu’elle voyait :

- Dis maman, pourquoi toutes les villes sont abandonnées ?

- Tu sais bien nous avons utilisé la quasi-totalité des ressources de la planète ma chérie. La plupart des gens sont partis vivre à la campagne pour faire pousser de la nourriture que les grandes surfaces ne peuvent plus leurs fournir, répondit Stéphania.

- Oui, mais dans ce cas, pourquoi est-ce qu’on ne part pas tous sur Mars ? Mes amies m’ont dit que beaucoup de personnes y vivent et y sont très heureuses.

- Partir là-bas coûte très cher, peu de gens peuvent se payer un tel voyage. Fort heureusement, nous avons gagné ce concours. A  présent, essaye de dormir.

 

    Plusieurs heures s’écoulèrent. Stéphania et sa fille qui s’étaient assoupies depuis que la limousine avait passé Crystal Spring furent réveillées par des cris lointains. A travers la vitre, elles purent enfin ce qu’elles attendaient depuis leur départ : la dernière fusée. Elle se dressait fièrement au loin, sa magnifique dorure argentée menaçant de perforer le ciel noir dont seule la Lune apportait une éclaircie. Autour de la fusée, des longs barbelés électriques entourait le site de décollage afin d’empêcher les dizaines de milliers de personnes qui s’y étaient entassées tout autour d’y entrer. C’est alors que le robot conducteur, qui n’avait pas dit un mot durant toute la durée du voyage, baissa la vitre qui séparait la cabine conducteur de celle des passagers et dit : « Mesdames, nous sommes presque arrivés à destination. Comme prévu, beaucoup d’individus tentent de s’introduire dans la fusée. Mais ne vous inquiétez pas, des gardes armés postés tout autour des barbelés ont ordre de tirer à vue pour tout tentative d’intrusion non autorisée. Je tiens également à vous rassurer quant à l’inviolabilité du véhicule de la compagnie. Cependant, lorsque nous approcherons de la foule, je vous prierai de vous équiper des bouchons d’oreille qui sont à votre disposition dans la poche avant gauche du véhicule, cela pour votre confort. » Et il réhaussa la vitre aussitôt qu’il eut fini de donner ses instruction, sans laisser à ses passagères le temps de pouvoir poser la moindre question.

 

    Le véhicule s’approcha de la foule qui commença lentement à s’écarter sans trop s’éloigner malgré tout. Des visages remplis de colère fixaient la limousine qui se permettait de se frayer un chemin parmi eux. Le début de la traversée vers l’entrée se déroula sans heurt, malgré le fait que Stéphania et Louise durent affronter les regards de gens dont la vie semblait brisée. C’est alors qu’un de membres de la foule sortit une batte de baseball cachée sous sa veste et tenta de briser la vitre arrière droite de la limousine, sans succès. Immédiatement, des fusils mitrailleurs sortirent du toit du véhicule et arrosèrent de balles l’agresseur qui fut tué sur le coup. Stéphania comprit alors la raison pour laquelle le robot conducteur leur avait conseillé de s’équiper de bouchons d’oreille. Des cris d’horreur s’élevèrent immédiatement de la foule face à ce spectacle, ce qui eut pour conséquence de créer un mouvement de panique. Cela facilita l’avancée du véhicule qui faisait à présent figure d’épouvantail. La limousine put ainsi atteindre la porte d’entrée et fut accueillie par des gardes armées qui ouvrirent la porte. Cela n’empêcha pas deux individus de tenter de passer la porte, mais les gardes postés en hauteur de l’entrée firent immédiatement feu mettant fin à leur tentative. Une fois la limousine passée, la porte d’entrée se referma immédiatement. Le robot conducteur débloqua les portes arrières et invita ses deux passagères à sortir pour se rendre dans la fusée.

 

    Quatre gardes escortèrent Stéphania et Louise vers la fusée, dont les moteurs commencèrent juste à s’allumer. La vue de l’allumage des moteurs excita à foule qui se massait à nouveau en masse tout autour des barbelés. Au loin, des coups de feu retentirent pour stopper quelques nouvelles tentatives d’intrusion. Arrivés à l’entrée de la fusée, une hôtesse prit le relais des gardes pour conduire les deux nouvelles passagères dans le vestiaire : « Bienvenue à bord mesdames ! La compagnie s’excuse pour les légers désagréments auxquels vous avez dû faire face. Nous tenons à vous féliciter à nouveau d’avoir remporté le grand concours de Gemini Croquette. Voici les combinaisons que vous devez porter pour votre voyage vers la Lune. »

 

    Une fois équipées des combinaison, Stéphania et Louise suivirent l’hôtesse qui les fit entrer dans l’ascenseur qui le mena vers leur place. A travers la votre de l’ascenseur, Stéphania put voir que de nombreux autres passagers étaient présents. Ils étaient tous allongés sur leurs couchettes avec leur combinaison. Ils étaient apparemment les derniers. Stéphania demanda à l’hôtesse :

- Savez-vous combien de passagers sont à bord ?

- Oui, environ 1200. Il y a de tout, des milliardaires, des ingénieurs, des techniciens et  nos grandes gagnantes du concours, répondit l’hôtesse avec un grand sourire. Ha ! Nous sommes arrivées. Voici vos couchettes. Vous devrez vous équiper des grandes ceintures de sécurité. Nous ne pourrez vous lever qu’une fois arrivées à destination. Le voyage dure deux heures environ. Je vous souhaite un agréable voyage.

 

    Une fois installées, Stéphania demande à sa fille qui était juste à côté d’elle si tout allait bien. Bien qu’un peu paniquée par la situation, Louise répondit par l’affirmative. Sa mère lui dit alors : « Tu vois, on va pouvoir enfin le voir le dernier concert du clone de Michael Jackson sur la Lune. »

 

FIN